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Le journal de guerre de Jean Bousquet 1917-1919

3 juillet 2015

8 - Champenoux - Serres - Bois du Raon 1917

    Nous occupons tour à tour les secteurs de Mazerulles et des environs durant fin avril et la première partie du mois de Mai.

    Les sous-bois sont des plus jolis, les cabanes faites par les poilus les années précédentes ne servent plus mais avec la brume du matin sont à photographier pour en garder le souvenir. Dans ce bois il n'est pas rare de rencontrer par place des tombes de français ou de boche, il y amême des tranchées faites hâtivement en 1914 qui servent de tombes à des groupes de soldats tués  lors de la bataille de septembre. du côté de notre butte de tir où nous allons faire nos exercices à la mitrailleuse, il y avait des tombes de boches. d'un autre côté près d'une guitoune il y avait une tombe de trois bavarois avec un petit entourage bien précaire. Il est certain que tout cela n'existe plus maintenant.

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Forêt de Champenoux 27 avril 1917Tombes de 3 bavarois

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Bois du Raon 28 avril 1917 - Le déjeuner des mitrailleurs sous bois.

   La compagnie de mitrailleuse partait des journées entières au moins, au bois du Raon où du reste, les restes du bataillon allait pour faire des corvées de toutes sortes, peut-être même aussi faire des coupes de bois. Les poilus déjeunaient sur place. Le 28 avril je prends une photo des mitrailleuse à l'heure du repas.

  Nous quittons ce secteur pour cantonner quelques heures à Serres où les cuisines roulantes nous servent un repas chaud et de là nous filons sur l'Est pour aller prendre les lignes dans le secteur de Bathelemont.

BATHELEMONT

   Bathelemont est un très joli pays en bon état, mais malheureusement entouré de grosses pièces d'artillerie, ce qui peut-être nuisible pour son avenir. des obus boches tombent dans les champs entourant ce pays perché sur une légère hauteur. Le bataillon est en ligne plus à l'est également sur quelque hauteur renommée.

    Lors d'un coup de main boche nous avons eu des pertes dans les compagnies et aussi malheureusement à la mitraille où quelques bons petits mitrailleurs sont tués peu avant une relève. Leurs camarades ont tenu à les ramener au village où ils furent enterrés.

   Le bataillon occupait aussi parfois un bois à proximité du village nommé "Bois de Bénamont", où des cabanes assez confortables étaient installées et qui avec les premiers beaux jours étaient du plus joli effet. Il y avait de nombreuses sources et les poilus avaient organisées des cascades à l'aide de troncs d'arbres creusés et inclinés.

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   Dans les clairières du bois, de place en place sont installées des mitrailleuses dont le canon est vers le ciel. Certaines sont même installées sur des roues de voitures fixées sur des troncs d'arbres et servant de plate-forme tournantes. C'était en somme un cantonnement de repos.

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3 juillet 2015

7 - la Neuvelotte-Champenoux- l'As des "saucisses"

    Nous venons au repos à Champenoux, pour ma part je venais de prendre quelques jours de permission à Paris.

    Le bataillon était cantonné dans des baraquements à une sortie de Champenoux côté Sud-Ouest. Nous n'étions pas loin d'une partie de la forêt où nous allions souvent pour y faire des tirs à la mitrailleuse. Nous partions avec les mulets et voiturettes et une butte de tir à quelques kilomètres sous bois servait pour les exercices. Presque tous les hommes prenaient leur tour sur la sellette de la mitrailleuse ou passaient les bandes de cartouches ;  comme les autres j'ai eu l'occasion de tirer ou de faire le servant, à mon avis il était plus facile et aussi plus agréable de tirer que de servir. 

    Je fais entre temps de nombreuses promenades à cheval aux environs avec Hydille qui de plus en plus s'apprivoise. Toujours très craintive "sur l'oeil" mais docile et des plus agréable à monter. Il ne faut pas pour lui faire plaisir rencontrer des voitures automobiles sur les routes, ni surtout de rouleaux à vapeur. Cette fois c'est le bouquet, rien ne semble pourvoir lui faire plus peur. Il me faut la tenir bien en jambes et avoir la cravache prête ; elle passera quand même mais sera en eau. Quelle peur ! Il me faut souvent activer mon allure ou au contraire la ralentir quand de loin je vois arriver une auto surtout si celle-ci a des bâches de côté qui flottent au vent, pour ne pas me croiser avec cet engin "infernal" (je pense que c'est ainsi que devait appeler ma jument ces genres de rencontres) à la hauteur d'un pont ou près d'un ravin, car dans un moment d'affolement elle se jetterait de côté sans regarder le danger, voire même se jeter sur une ligne de chemin de fer en contre bas, au risque de se faire écraser par un train.

   Le 14 Avril lors d'une de mes promenades à pied du côté de la Neuvelotte en quête de quelques photos à faire, je vais à peu de distance photographier une fausse gare, où il y a des rails, puis des wagons en simili. Les rails sont en bois et les wagons à quai sont en toiles peintes montées sur chassis. Il y a des faux tas de bois fais également avec des toiles peintes, de vrais décors, des canons en bois etc...au loin je vois un avion boche piquer droit sur une "saucisse" du côté du plateau de la Rochette. Je savais que cette saucisse descendait souvent en feu, victime de quelque avion boche, ou alors était descendue rapidement au sol dès qu'un boche était signalé. Ce jour là à l'approche du boche, la saucisse reste au bout de son fil, l'avion fonce dessus, j'entends le crépitement de la mitrailleuse et à mon grand étonnement l'avion tombe en flammes. J'ai eu l'explication, l'offcier de marine pilotant la saucisse s'était  muni cette fois d'une mitrailleuse et avait exterminé l' As boche, spécialiste des saucisses (comme en faisait foi ses citations trouvées sur lui.) Dans sa chute il avait quitté l'appareil pour s'enfoncer fortement dans le sol. Son appareil tombait à quelques mètres de lui. Quand j'ai pris ma photo l'avion en flammes dégageait une forte chaleur.

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Montenoy - 14 avril 1917 l'avion de l'As boche fini de bruler. 

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Mazerulles - 22 avril 1917 Brard et Delage

  Fin avril nous allons occuper le secteur de Mazerulles.

 

24 juin 2015

6 - "Hydille" ma 4e monture.

     Au début d'avril nouxs étions au repos à Champenoux, l'officer payeur est venu régler le prêt des officers et des sous-officiers et il en profite pour me demander de ne pas m'éloigner ayant quelque chose d'important à me communiquer.

     Il voulait que je fasse seller mon cheval et que je vienne avec lui à Réméréville où étaiot installé le bureau de Colonel et son État-Major - c'était pour que je vienne voir la fameuse jument dont il m'avait parlé peu de temps auparavant à Hoéville. Nous faisons les quelques kilomètres et nous arrivons dans une écurie où sont installés les chevaux de marque. A côté de celui du Colonel? J'aperçois dans la pénombre de l'écurie un alezan de bonne taille. Le lieutenant fait sortir la bête, lui fait faire un trot sur le côté de la route tenue en main par l'Ordonnace du Colonel. Je ne m'explique pas tout d'bord pourquoi le Colonel qui s'est en quelque sorte affecté cette monture ne s'en sert pas. Il y a longtemps qu'un médecin major trois galons venant des Dragons, puis passé au 206e puis évacué, n'a monté cette bête.

    Depuis le médecin major est tout a fait rayé de la liste des contrôles et sa jument est disponible. Plusieurs essais ont été faits pour la monter mais chaque fois ( heureusement) les cavaliers occasionnels mordaient la poussière. Le Colonel ne demandait pas mieux que cette bête me soit affectée jusqu'au jour où redevenue docile il pourrait la reprendre - ce qui fût convenu.

    Nous faisons une première petite promenade à titre d'essai. Le Lieutenant payeur la monte d'abord, pour ma part je monte son cheval, un animal peu sociable qui cherchait toujours à vous mordre et le nouveau médecin monte alors Loulou également à titre d'essai. Il en est enchanté. Je monte à mon tour Hydille qui est d'une douceur extrême, obéissant à la jambe mais très peureuse. Un simple papier sur la route la fait bondir dans un fossé, du linge qui sèche l'empêchera de poursuivre son chemin. Elle est réfractaire à l'éperon mais obéit au simple frôlement de ma cravache - le marché est conclu, je rentre à Champenoux avec ma nouvelle monture, le Lieutenant Godet tient à m'accompagner pendant quelques kilomètres, il est enchanté de ma voir enfin sur un vrai cheval.

    A partir de ce moment là, le Colonel ne manquait pas de me demander des nouvelles d'Hydille chaque fois qu'il me rencontrait avec toujours l'espoir de la monter à son tour.

    Quand fin mai, nous quittons ce coin de Lorraine pour aller au Bois Levêque et que nous traversons Nancy pour aller à la gare d'embarquement, le régiment fait entendre brusquement sa musique sans prévenir. Hydille en tombe à plat ventre sur les rails du tramway, d'émotion. Un léger coup de cravache et nous revoilà en route sans autre ennui qu'un léger temps d'arrêt. (Le Colonel n'était pas loin, c'était l'essentiel.)

 

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Foêt de Champenoux

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1917 - En route vers les boyaux allant vers les lignes. Debout sur le 1er wagonnet le sergent Pelletier, assis sur le second, le fourrier Brard, je ferme la marche.

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191- Hoéville. Chargement pour Décauville de piquets pour réseaux.

 

23 juin 2015

5 - Hoëville - Une escadrille boche apparait...

    Par très beau temps, le 16 mars dans le courant de l'après-midi alors que le sol était encore couvert de neige par place, des avions boches arrivent de l'Est. Ils sont très haut. Ils prennent la direction de Nancy et passent au dessus de Hoëville. Bien entendu nous nous précipitons tous dehors pour mieux voir. D'autres avions, cette fois des français évoluent un peu plus loin du coté de Réméreville..se voient-ils ? Il est probable puisque les boches semblent hésiter dans la poursuite de leur marche, ils tournent, nos avions avancent, les mitrailleuses entrent en danse. Nous voyons les trajectoires des balles lumineuses laissant un filet de fumée sur leur parcourt. Le crépitement s'anime, il nous est impossible de reconnaître nos avions des autres. Le soleil fait briller les ailes et  cocardes ou croix de Malte ne se voient plus. Un avion tombe faisant de nombreuses pirouettes, un autre le poursuit dans sa chute, c'est alors que nous voyons l'insigne boche au poursuivant. Le français culbute de plus en plus et va bientôt s'abimer dans un bois, mais...un autre avion resté jusqu'ici invisible à tous prend le boche en chasse et le descend en quelques balles. Il tombe en flammes loin du village et les deux français reprennent de la hauteur. Celui qui tombait en feuille morte et semblait désemparé exécutait tout simplement une manoeuvre audacieuse.

    A peine deux minutes après, de nouveaux les mitrailleuses se faisaient entendre...encore les boches. Cette fois ils voulaient se venger. Ils avaient fait semblant de repartir chez eux et avaient pris de la hauteur pour retomber sur les nôtres. La risposte ne se faisant pas attendre et le combat reprenant de l'ardeur, les boches se séparent, deux autres avions sont aux prises. De nouveau nous en voyons un descendre, cette fois ses croix sont apparentes, c'est un boche. Il semble désemparé, est-ce une manoeuvre ou une chute qu'il cherche à adoucir ? C'est une chute, le moteur est touché et l'avion tombe dans un champ où nous accourons, les brancardiers se munissent d'une civière. L'avion venant de culbuter dans son atterissage brusqué, des gosses de paysans viennent eux aussi aux nouvelles. Nous trouvons l'avion les pattes en l'air, l'hélice brisée. Le pilote est retiré de dessous la carlingue et  emmené au poste de secours. Il n'avait pas grand chose, et a pu être évacué dans les 24 heures. Nous apprenons que Guynemer venait de descendre ces 2 avions.

   

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 Transport du pilote boche bléssé dans sa chute

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22 juin 2015

4 - Hoëville - Mon troisième cheval

    En remplacement de "Pattes-à-ressorts" l'on venait de m'affecter un nouveau cheval du nom de Loulou, c'était donc ma troisième monture depuis mon arrivée au 206. Elle ne valait guère mieux que les précédentes, quoique très bonne bête, très douce, d'un bon trop ou galop, mais se fatiguant rapidement. Usée et pas très forte, un bon cheval pour un officier d'Infanterie à la condition de n'être pas trop lourd.

    Jusqu'ici j'avais eu "Pervenche" qui était venue avec moi de Béziers, bête à laquelle il ne fallait pas trop non plus lui en demander ; puis "Pattes-à-ressorts", trottant et galopant sec et enfin "Loulou" que je ne devais pas garder longtemps grâce aux démarches du Lieutenant payeur (vrai maquignon) qui s'était mis en tête de me trouver une bonne bête. Il cherchait l'occasion et avait une jument en vue, mais de son côté, le Colonel voulait se la réserver.

    Le 4 mars, Chérot à voulu photographier ma nouvelle monture. Il s'est livré à une petite mise en scène. L' Ordonnance du Capitaine qui s'occupait également de ma bête, tenait celle-ci par la bride pour la circonstance et je devais faire semblant de donner des ordres à Garbay, le Caporal d'ordinaires. Ma monture avait même sur le dos, la selle du capitaine Delumeau et j'avais à la main la cravache trouvée lors de notre arrivée à Verdun fin février 1916.

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    Le même jour, notre musique nouvellement créee donnait le soir son premier concert devant le bureau du Colonel. J'ai pu prendre une photo de la fenêtre de notre bureau donnant sur la rue.

    Depuis le début de la guerre nous n'avions en fait de musique que la clique, c'est-à-dire les tambours et clairons. Les régiments de réserves n'avaient pas de musique de prévue. Petit à petit tous les régiments de réserve en ont crée ; c'était une très bonne chose appréciée de tous les poilus. Les nouveaux musiciens prenaient les fonctions de brancadiers des Compagnie et pouvaient ainsi toujours être rassemblés dès que l'on était au repos sans gêner le service.

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22 février 2015

3 - Hoéville - Quelques aquarelles

  Je vais de temps en temps voir les Compagnies en ligne et principalement celle qui m'interesse le plus maintenant. La C.M.6, a des tranchées qui sont sous la neige, les hommes ont des petits abris individuels. Ils se chauffent soit au charbon de bois (ceux qui sont installés en surface) ou à l'alcool solidifié pour éviter la fumée ; les vivres sont ainsi réchauffées aux heures des repas.

  De larges tranchées communiquent avec l'arrière et débouchent près de Hoéville. Des petits wagonnets sur rails peuvent y  circuler et approvisionner les avants-postes, soit en vivres soit aussi en matériel de toutes sortes Planches et rondins pour les sapes en constructions soit des fascines* pour renforcer les parois des tranchées.

  Au cours de mes visites, je rencontre Pitaud, notre infirmier dévoué, Bloch, le nouveau télémétreur qui remplace Clanet dans cet emploi, mais il n'a pas à se servir de cet instrument pour mesurer la distance des positions ennemies, elles sont depuis longtemps repérées. L'emploi subsistera cependant jusqu'à la fin de la guerre, le télémétreur est en quelque sorte un agent de liaison en surnombre, il ne lui manque qu'un appareil de photo pour bien remplir ses fonctions, il a pour lui ses rimes.

  A Hoéville, l'église est comme toutes les autres rencontrées jusque là, elle est sans toiture, mais les statues intérieures ont résisté aux bombardements et incendies boches. En 1914 les boches avaient enfermés tous les civils dans cette église lors de leur avance pour pouvoir fouiller les maisons plus à leur aise et être ainsi les maîtres du village. Aussi les habitants regardaient -ils toujours cette église d'un mauvais oeil ou plutôt avec un mauvais souvenir...

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  J'occupais mes journées à faire des aquarelles, mais avec ce grand froid, j'étais obligé de me munir d'eau chaude et de tenir mon tube de métal dans le creux de la main gauche pour l'empecher de refroidir trop vite. Comme récipient pour mettre mon eau chaude je me servais de mon tube de savon à barbe. 

  Le 24 janvier lorsque je m'étais installé sous une porte de la tour de l'église le froid était très vif, mon pinceau gelait dès que je le sortais de l'eau. J'ai du m'installer près d'une cuisine roulante qui était là, mais l'eau gelait dès qu'elle était mise sur ma feuille de papier. Le ciel à droite du clocher  (sur mon aquarelle) à une sorte de nuage, celui-ci à été formé par l'eau gelée immédiatement après être posée.

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  J'ai fait une autre fois une aquarelle au grand air, le poste de T.S.F qui était situé à la sortie du village vers Courbesseaux, il faisait également très froid, j'avais les pieds dans la neige et ai dû peindre avec des gants.

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  Les environs du pays n'offraient pas beaucoup de sujets à peindre, tout était sous la neige. Je fais cependant quelques petits croquis soit du village pris de loin, soit d'un arbre observatoire qui se trouvait à l'entrée d'un bois à gauche de la route conduisant vers Réméréville où nous avions cantonné en 1915 avant notre départ pour la Woëvre.

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* Une fascine est un fagot de branchages utilisé pour combler des fossés, réparer de mauvais chemins et faire des ouvrages de défense.

13 février 2015

2 - Suite Hoéville - Nourriture et distractions

  Tous les fourgons venaient se ranger sur un côté de la route à une entrée du pays, près du cimetière.

  C'est la route elle-même qui servait de table pour le partage de toutes les denrées destinées aux Compagnies et ensuite aux sections. Le vin était mis en tas par Compagnie puis avec une hachette on cassait des petits morceaux pour faire les parts. Ceux-ci jusqu'à la fin du partage restaient sur des sacs, puis ensuite mis dans des sacs à terre (destinés au transport de terre) soit dans des seaux pour le transport aux lignes. Le pain était lui aussi fortement gelé et très difficile à séparer. Lorsque l'on devait couper une boule en deux, il n'y avait que la hache pour en venir à bout. Nous avions essayé avec une scie, mais c'était impossible, les dents ne pouvant y entrer. L'entaille faite se resserrait en coinçant la lame de la scie. Enfin la viande, elle aussi était partagée sur le milieu de la route purifiée par la basse température, d'ailleurs nous n'avions pas l'habitude d'y regarder de très près.

  Dans notre bureau, nous recevions le soir nos camarades lors d'une période de repos de la Compagnie. Des parties de cartes avaient lieu, nous banquetions souvent, c'est à dire que les repas un peu plus soignés duraient une partie de la nuit. Les soirées se passaient auprès du feu que le sergent major savait faire marcher sans ménager le combustible. Pour cela notre ration de bois ne suffisait pas. Nous allions la nuit tous les deux au milieu de la neige vers un dépôt du génie où était entreposé un important tas de bois, chevrons de toutes grosseurs et longueurs. Nous nous dirigions au clair de lune en ayant soin d'enfoncer nos passe-montagne jusqu'aux yeux, pas seulement pour nous préserver du froid, mais surtout afin de n'être pas reconnus en cas de "mauvaise rencontre". Aussitôt arrivés dans notre demeure, les lourds chevrons étaient tout d'abord débités en trois ou quatre morceaux et ensuite montés dans notre bureau servant de chambre et de salle à manger. Alors les morceaux se faisaient nombreux et nous avions une provision pour 24 ou 48 heures.

 

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  Je passais mon temps lorsque les autres jouaient aux cartes, à faire des croquis ou recopier des aquarelles que je donnais à mes voisins. J'ai même essayé de faire des croquis des têtes de nos visiteurs, Clanet, Chérot, Garbay avaient leur têtes esquissées sur des feuilles de papier comme le montrent les photos ci-dessus.

 

 

 

11 février 2015

1 - "Secteur de Lorraine" Hoéville

  Le 206e revient tenir le secteur de Lorraine, c'est à dire les avants postes de la région de Sorneville - Hoéville.

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  Notre bataillon occupe le secteur d'Hoéville. des compagnies sont installées dans un bois à gauche du village et les autres sont dans les tranchées face à Bezange. C'est un secteur très calme et les bureaux de Compagnies peuvent rester dans le village où est installé également le bureau du colonel.

  Les voiturettes des mitrailleuses, c'est à dire l'échelon, dont je suis passé le chef restent à Hoéville. Elles sont rangées le long des maisons, mais pas à l'abri des intempéries. La neige vient recouvrir toute la campagne puis le froid est de plus en plus vif, elles sont immobilisées, leurs roues enfoncées dans une forte couche de glace qu'il faut casser à la hache si l'on veut en déplacer une.

  Le thermomètre est descendu une nuit à -22° ce que nous n'avions jamais vu jusqu'alors. Mais les Compagnies en lignes placées sur un plateau éventé ont vu le mercure descendre jusqu'aux environs de -28°. Malgré cette forte baisse de température il faisait bon au dehors à condition de ne pas se trouver dans une partie où le vent soufflait.

  Cependant la nuit, si l'on n'avait pas soin de garnir les poëles pour garder du feu, l'on s'apercevait que le froid existait toujours au dehors. Notre bureau de Compagnie était installé dans la première maison du village en formant la pointe avancée vers la campagne, elle laissait un peu à désirer comme confort. Des fentes laissent le vent entrer un peu de tous les côtés. Le matin pour se lever on était en quelque sorte cloués sur nos couchettes, celles-ci étaient superposées comme sur un bateau, en guise de sommier et de matelas il y avait du treillage tendu sur lequel était notre couverture. Mais ce n'était pas suffisant. J'ai connu alors une période de douleurs à croire que j'étais rhumatisant pour la fin de mes jours. J'allais chaque jour au Poste de secours chercher du baume Bengué ou du salicylate de méthyle ( écrit mithyl). J'en ressentais un peu de soulagement, mais le lendemain c'était à recommencer. C'est alors que nous avons mis de la paille sur nos treillage et que nos nous sommes procuré d'autres couvertures.

  Avec ce grand froid, le ravitaillement se faisait difficilement. Les fourgons qui nous apportaient les vivres, venaient d'un village voisin Courbesseaux. Les chevaux étaient tous munis de crampons à glace, mais malgré cela n'avancaient qu'avec peine. En cours de route les barriques de pinard éclataient sous la pression du froid, mais le pinard ne se sauvait pas, et pour cause il était en bloc !

    

9 février 2015

L'année 1917

  Cette année là, je suis agent de liaison "à la Mitraille". Je n'ai plus affaire au chef de Bataillon, tout en restant affecté au 6e Bataillon où je suis depuis 1914.

 Avec mon nouveau Chef, je fais parfois des inspections vers les lignes, mais je suis surtout chargé de la direction des conducteurs de voiturettes de mitrailleuses. Il ya en a 16 ainsi que 16 voiturettes et autant de mulets (sauf quand nous en avions de tués, de blessés ou de "récupérés").

  A nouveau je change de monture. Cette fois j'hérite d'une belle bête qui fait fort envie au Colonel. Il ne se passait  de mois sans qu'il m'en parle. A chacune de nos rencontres il me demandait si elle était docile. Elle était connue comme très sensible des reins et aimant se débarasser de son cavalier. Le Colonel voulait éviter de se donner en spectacle. De temps en temps mon Capitaine la montait, mais quoique bon cavalier et pas peureux, il lui arrivait de descendre plus vite qu'il ne le souhaitait. Le Colonel étant au courant et j'ai ainsi pu garder ma jument "Hydille" jusqu'au bout.

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  Les cinq premiers mois sont passés en Lorraine, aux environs de Nancy.

  En juin nous allons dans un camp d'instruction où toute la division est réunie.

  En juillet, nous allons occuper le chemin des Dames, où nous revoyons un "Petit Verdun" en raison des tirs d'artillerie mais avec en plus es obus à gaz".

  Nous venons ensuite au repos près de Paris, pour ensuite remonter à nouveau au chemin des Dames.

  Puis nous venons au repos près de Bazoches à Saint-Thibaut (près de Fîsmes - Marne).

  En novembre nous allons vers Saint-Quentin en vue d'appuyer une attaque des anglais.

  En décembre, nous voici de retour à Verdun et notre régiment occupe le secteur de Bras au nord de Verdun.

9 février 2015

Second volume du journal de guerre de Jean Bousquet

 

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Voici donc le second volume du journal de guerre de Jean Bousquet de Rouvex (1889 - 1992)

Le premier volume peut-être lu ICI.

Le premier volume concerne les années 1914-1916

Le second commence en janvier 1917 à 1919.

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Le journal de guerre de Jean Bousquet 1917-1919
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